mercredi 6 mai 2015

L'UT4M 90, le 23 août 2014: Premier trail long!




Je suis avec Tim et Thibault, fidèles coéquipiers de raid et donc partants pour tenter l’aventure de ce 1er trail long.

A 8h30, nous montons dans le bus au Parc Mistral de Grenoble, direction Rioupéroux, un village… charmant, encaissé entre les montagnes, qui ne voit pas le jour de l’année et où il ne se passe rien, si ce n’est ce départ de l’UT4M 90 ! Nous arrivons sur place vers 9h20, dernier encas, derniers préparatifs, Tim fait son show, on s’encourage.
Et, d’un coup, c’est le décompte « 10, 9, 8… ». Merde, dans 10 secondes, je suis partie pour courir 90 bornes !

Départ. On commence par une boucle dans le « village » de La Salinière, pour étirer le peloton avant la première montée. Etranges, ces premières foulées, comme si le cerveau se refsait à analyser ce vers quoi on se lance. Vide. Pas de pensée. Les jambes courent.
Très vite, on attaque la redoutable montée vers le Plateau de l’Arselle. Comme prévu et comme repéré sur la carte la veille au soir, ça monte sec, très sec. Tim et Thibault sont partis devant, espérant faire la course ensemble. Je ne voulais pas partir vite. Mais là, je me retrouve coincée derrière des coureurs vraiment plus lents que moi. Il faut que je les double, sinon…eh bien, je suis pas arrivée ! Donc, tout au long de la montée, je dépasse, par grappes, parfois au prix de quelques accélérations, je me sens bien, les jambes toniques, essoufflée mais sans plus. Quelques derniers lacets bien raides et nous voilà à Chamrousse, je reconnais le poney-club de Bachat-Bouloud, je suis un peu à la maison, voilà qui m’aidera bien pendant toute la course.

Dès les hauteurs de Chamrousse, nous sommes dans le brouillard, de plus en plus épais. On distingue à peine le Lac Achard, juste avant le ravitaillement de la Croix de Chamrousse, purée de pois à couper au couteau ! Ouf, ravito à l’abri dans une construction attenante au télésiège. Je bipe, je rentre et, qui vois-je ? Tim et Thibault qui s’apprêtent à repartir ! Bien sympa de vous voir là ! Ils repartent vite. Je bois, je mange, je me couvre, il va faire frais à la sortie. Il est environ 13h.
C’est reparti, dans le brouillard, toujours aussi épais. Je connais cette section pour l’avoir déjà parcourue à 2 reprises. Je reconnais à peine l’arrivée aux Lacs Robert. Descente. Remontée. Refuge de la Pra. Je bois. Il reste une courte descente, avant la montée au Grand Colomb, une montée très raide à nouveau. La tête dans le brouillard depuis plusieurs heures, je suis bien dans ma bulle, un peu à l’ouest, mais pas trop, je me sens toujours bien dans les montées. Je double plusieurs concurrents du 160 km, pathétiques, titubants, épuisés, je ne sais que leur dire, plutôt envie de leur crier d’arrêter…D’un coup, le sommet, je ne l’avais pas vu arriver. Et Jocelyn, de Wider, est là, nous échangeons quelque mots, il fait quelques photos, c’est toujours bien agréable de croiser quelqu’un que l’on connaît ! Et je plonge dans la descente. Je l’appréhendais cette descente, sur le profil, elle avait l’air bien casse-gueule. Ca va, j’essaie de bien prendre garde dans les passages plus raides. Soudain, le brouillard se déchire, ça fait un bien fou, après des heures dans le coton ! Je savoure la vue. Je reconnais un endroit où je suis passée à skis ce printemps, ça me donne la pêche. Petit sentier, puis piste, puis route. Je fais un bout de chemin avec un Toulonnais, on discute un peu.

Ravitaillement de Freydières. Je mange, je bois, remplis mon Camelback. Là, je ne reconnais personne et me sens un peu seule, mais je ne m’attarde pas. Vers 15h30, je repars.
Commence alors la partie la moins agréable de la course. Il faut relier les 2 massifs, passer de Belledonne à La Chartreuse…par une longue traversée de la vallée. Descente, puis plat, dans un monde urbanisé qui contraste avec le brouillard montagnard de Belledonne, et sa solitude. Passage à côté d’usines, traversée de voie ferrée, pont au-dessus de l’autoroute. Retour brutal à la civilisation. Je me sens bien seule…Je ne parviens pas à courir tout le temps. Je marche, puis me fixe un point à partir duquel recommencer à courir. Saint-Nazaire-Les-Eymes enfin ! Où donc est le ravito ? Les derniers mètres dans le village me paraissent interminables.

Heureusement, le ravito est vraiment sympa, de la place, pas de cohue, une grande salle, des bénévoles très disponibles, un bon bol de soupe vermicelles, quelques tucs, du pain et du fromage, de l’eau, du coca, changement de chaussettes…et c’est reparti !
Je suis regonflée à bloc ! Ca grimpe, et c’est là que j’avance le mieux. Je repars donc d’un bon pas et me lance dans l’ascension du Col de la Faïta à un rythme plutôt soutenu. Je suis pas mal seule au début, puis remonte plusieurs coureurs du 160. J’ai 2 filles du 90 en ligne de mire, je grignote du terrain, mais ne parviendrai à les distancer que bien plus tard. Heureusement que j’avais la pêche ! Il est vraiment hard ce col ! On commence à sentir la fin du jour, dans ma tête, je calcule, je n’arriverai pas à 22h, pas à minuit sans doute, 2h dernier carat, j’espère…Superbe lumière de coucher de soleil sur la plaine de l’Emeindras, coucher de soleil lumineux sur Belledonne. Petit pincement au cœur, arriverais-je à gravir Chamechaude avant la nuit ?

Je peine un peu plus dans la portion Emeindras-Habert de Chamechaude, ça monte pas mal, j’ai envie d’arriver au ravito, d’arriver en haut de Chamechaude, après, ça sentira vraiment la fin. Cocon de chaleur, du feu et humaine, au ravito du Habert de Chamechaude. Je ne m’éternise pas près du feu, je sens qu’il ne va pas être évident de repartir. Et voilà que je retrouve Thibault ! Il repart du ravito à mon arrivée ! Peut-être le rejoindrais-je dans quelques km…
Je repars avec une bonne motivation. Dernière grosse grimpette. Ce qui m’angoisse le plus, c’est l’arrivée de la nuit. Je la connais bien, cette montée à Chamechaude, traversée jusqu’à la Cabane des Bachassons puis montée directe. C’est long tout de même, le vent bien frais donne une ambiance plus rude. Enfin, le « sommet », 2 militaires qui nous pointent, juste sous le vrai sommet. Là, je sors ma frontale. Il fait déjà bien sombre et la descente est délicate, d’autant plus que les piles de ma frontale donnent des signes de faiblesse. J’aurais pu penser à les changer avant ! En bas de Chamechaude, je mets ma 2ème frontale autour de ma poitrine. Je changerai de piles au ravito.

Il est loin ce ravito…Après le Col de Porte, on emprunte une large piste raide et très boueuse, bouh, je n’aime pas ! Puis, peu à peu, je m’habitue à l’obscurité et me remets dans ma « bulle ». A ce stade, en descente, je trottine doucement, les jambes ont perdu de leur élasticité…
Je reviens sur un autre coureur, sa silhouette, son sac me disent quelque chose…c’est Thibault ! Nous sommes bien contents de nous retrouver ! Nous continuons donc ensemble cette interminable descente vers le Sappey, petite erreur d’itinéraire à un moment. Le ravitaillement est tout en bas du village, au chaud, à nouveau, havre de lumière et de chaleur face à l’obscurité du dehors. A nouveau, bonne petite pause, soupe, tucs, changement de piles de frontale.

Ah, ça change tout avec un meilleur éclairage ! Nous repartons vaillamment à l’assaut du St Eynard, et dans cette montée, je double enfin pour de bon une autre fille, qui ne cessait de me doubler dans les descentes, alors que je la doublais dans les montées. A partir de là, on ne pense plus qu’à l’arrivée. Arriver enfin…La montée au Saint Eynard passe bien. Vue superbe sur Grenoble illuminée tout en bas. La descente, quant à elle, est bien longue…Les lacets n’en finissent pas, les jambes en ont marre. Le Col de Vence ! Ouf ! Dernier ravito rapide, on ne s’attarde pas trop, l’envie de dormir guette, l’estomac malmené commence à ne plus trop supporter la nourriture.

C’est reparti ! Légère remontée jusqu’à la base du Mont Rachais. D’un coup, un croisement, un coup de frontale à gauche, à droite, ça y est, je visualise exactement où on est, pas où nous allons passer à la fin. C’était jusqu’à présent flou pour moi, allions-nous jusqu’en haut du Mont Rachais ou pas ? Eh bien, c’est non, nous restons à sa base et plongeons vers la ville. A partir de cet endroit, je connais le sentier par cœur. Les virages, les pierres, le dernier passage casse-gueule avant de retrouver le large sentier du Mont Jalla, tout défile dans ma tête avec précision. Mont Jalla, les lacets, la Bastille enfin, comme je l’aurais attendue cette Bastille ! Et là, je connais vraiment par cœur, lacets, marches, lacets. Soudain, j’entends Thibault me dire qu’une autre fille nous rattrape, ok, ça me soûle mais je ne peux pas tellement accélérer, et je vois quelqu’un, que je pense être Thibault, me doubler à bonne allure. Il en a de bonne d’accélérer ainsi ! J’essaie de revenir sur lui, mais peine perdue. J’accélère un peu tout de même.
Bas de La Bastille, pas de Thibault, bon, je continue. Je sais exactement quel itinéraire nous allons emprunter pour rejoindre le parc Mistral, c’était mon parcours de footing matinal en hiver.  Et là, je me dis qu’il faut continuer à courir, ne pas marcher, sinon, cela va être affreusement looong ! Je découpe le chemin qu’il reste à parcourir en petites sections et me concentre sur le franchissement de chacune d’elles, le sentier près de l’herbe, le pont, la piste cyclable, le pont…le début du parc, le parc, la rue à traverser, le parc, et…l’arche bleue, là toute seule.

Intérieurement, une grande joie déferle en moi, je souris, toute seule dans la nuit, ce n’est pas la foule, au Parc Mistral ( !!), j’allonge la foulée et serre le poing de victoire devant les maigres encouragements. Cette arrivée, c’est avant tout ça, ce poing serré, symbole de ma victoire sur les km et la fatigue, ce poing serré qui signe la fin des efforts, ce poing serré qui veut dire « ça y est, c’est fait », comme un grand cri de joie !
 Tim est là, sur le bord, emmitouflé dans sa couverture, un brin hagard. Et, Thibault, où est-il ?? Pas arrivé. Tim secoue la tête, non. Un moment d’inquiétude, je ne comprends pas. Et…voilà qu’il franchit la ligne. Stupide méprise…c’est moi qui l’avais distancé en tentant de rattraper quelqu’un d’autre !
Il est 2h15 du matin, Thibault et moi avons mis un peu plus de 16h (16h12 et 16h15), Tim a mis environ 14h et termine 11ème au scratch. Thibault et moi 30ème et 31ème. Pas si mal !
Bref, nous sommes là tous les 3, « finishers », épuisés mais encore bien debout sur nos jambes, heureux de cette belle aventure. Une de plus ! Et merci à vous deux, seule, je n’aurais peut-être même pas osé prendre le départ !
Petite soupe puis retour chez moi pour un dodo bien mérité ! Quel bonheur de retrouver son lit…

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